En Europe, 1 700 milliards d’euros sont fournis aux banques par les États, sous forme de prêts ou de garanties (Heyer et Timbeau, 2012). La priorité est d’éviter les effets en cascade de la crise bancaire. Si le système bancaire est en large partie sauvé, l’impact récessif n’est pas évité. 7La crise financière se mue en crise économique dès la fin de l’année 2008. En France, l’évolution du PIB, qui avait été de + 2,3 % en 2007, n’est plus que de + 0,1 % en 2008 et devient négative en 2009 (-2,5 %). Dans la zone euro, cette année 2009 est marquée par un recul encore plus fort de la richesse produite (-4,1 %). Pour faire face au choc de demande observé au niveau mondial, les États engagent des politiques économiques très actives, notamment à travers leur composante budgétaire mais aussi par le biais des dépenses sociales dont la croissance n’est pas entravée. Il s’agit de permettre à celles-ci de jouer leur rôle traditionnel de stabilisateurs automatiques, par exemple à travers une atténuation de la perte des revenus individuels en cas de perte d’emploi. 8Ces interventions permettent un retour de la croissance au cours des années 2010-2011. Mais simultanément, et très logiquement, elles entraînent une augmentation des déficits et de l’endettement publics. Les niveaux de ceux-ci dépassent alors largement les seuils que les pays de la zone euro s’étaient eux-mêmes imposés lors de la création de leur monnaie commune. La crise prend alors une autre dimension. 9Qualifiée de « crise des dettes souveraines », elle met en lumière la dépendance de nombreux États européens à l’égard des marchés financiers. Ceux-ci, contribuant au refinancement des dettes publiques par le placement des titres correspondants, manifestent leur inquiétude quant à la capacité de certains débiteurs à honorer leurs dettes. Le risque d’une évolution défavorable des taux d’intérêt auxquels les gouvernements peuvent se procurer des fonds à court, moyen ou long terme s’accroît considérablement, aggravant encore, pour les plus fragiles, leur endettement. D’où la mise en place, en Europe, de plans d’assainissement budgétaire à l’initiative soit des gouvernements nationaux, soit de l’instance dénommée « troïka », qui regroupe le Fonds monétaire international, la Banque centrale européenne et la Commission européenne. Dans ce dernier cas, qui a concerné des pays comme la Grèce, l’Irlande, Chypre et le Portugal, l’octroi de l’aide a été conditionné à la mise en place de plans de réformes structurelles sous la forme, notamment, de privatisations d’entreprises, de diminution de l’emploi public et de flexibilisation du marché du travail. Ces mesures, censées selon leurs promoteurs contribuer à un assainissement des finances publiques et à une diminution de l’endettement de l’État, ont un impact rapide en provoquant un quasi-arrêt de la croissance économique sur le Vieux Continent. Engendrant une nouvelle augmentation du chômage et un allongement de sa durée, cette nouvelle phase de la crise économique débouche sur une crise sociale profonde, qui peut avoir des répercussions politiques importantes.